L’Usine Digitale : Comment s’est constitué le groupe Skeepers ?
Marc Bonnamour : Skeepers est né sur les fondations d’Avis Vérifiés, suite au rachat de cette société par un fonds d’investissement américain (Providence Strategic Growth) afin de constituer un groupe sur la notion d’engagement client ou la voix du client. Avis Vérifiés permet aux consommateurs et clients de donner leur avis, après l’achat, sur des produits et services. Notre promesse est de collecter les avis de manière responsable, éthique et engageante, à savoir que les avis sont modérés mais ni filtrés, ni modifiés, ni hiérarchisés, qu’ils soient positifs ou négatifs. C’est une garantie d’authenticité totale que nous accordons en tant que tiers de confiance aux consommateurs qui les consultent.
Vous êtes ensuite développé sur des compétences annexes…
Nous avons voulu étendre la palette des solutions du groupe par sept rachats d’entreprises, toutes dans la thématique de l’engagement client. Nous accuserons ainsi du “feedback management”, enquête de satisfaction pour évaluer le retour du client et faire en sorte que la marque puisse adapter sa stratégie. En fonction du niveau de satisfaction, une note de recommandation NPS est attribuée. Une autre brique, “Insight Activation”, porte sur la collecte de données pour déduire les comportements des consommateurs, cibler le message à lui distribuer, en fonction de ses recherches et achats, pour mieux gérer la pression marketing.
En 2021, nous avons investi dans le marketing d’influence pour piloter des campagnes d’influence, par des micro-influenceurs aptes à parler d’un produit, l’idée étant de rester sur le principe du consommateur qui parle au consommateur de produits de grande consommation (cosmétique, bricolage…). Nous avons fait une acquisition dans le “Consumer Video”, une marque demandant à ses clients de réaliser des vidéos sur ses produits. Enfin, nous avons acquis une solution de “Live Shopping”, pour la création d’événements, d’animations, autour d’un produit, à travers une mise en scène particulière, en vue d’engager le consommateur à contribuer à l’ image de la marque.
Dans chacune de ces activités, l’objectif est que la marque noue une connexion plus approfondie avec ses clients. L’acte d’achat est ainsi plus humanisé. La valeur est créée par le consommateur et pour le consommateur.
En quoi ce portefeuille de solutions répond-il aux problématiques rencontrées par les marques ?
Nous répondons à deux besoins, l’un, la digitalisation, accélérée par le Covid, l’autre, l’authenticité et l’engagement. Le marketing institutionnel a atteint ses limites. Le consommateur devient un élément clé de la communication. Cette palette de solutions apporte des réponses concrètes aux problématiques de visibilité, de conversion et de rétention.
Où êtes-vous déposés aujourd’hui ?
Skeepers compte 13 bureaux. Marseille est sa principale implantation, avec 150 personnes et la majeure partie de la R&D. Nous sommes aussi, en France, à Paris, Nantes, Toulouse, Rennes, Lille, et à l’international, en Espagne, au Portugal, en Italie, en Allemagne, au Brésil, aux Etats-Unis et au Canada. Chacun de ces bureaux couvre une spécialité. Nous servons aujourd’hui plus de 8 000 clients de toutes tailles, de grands groupes comme Volkswagen, LVMH, L’Oréal, TotalEnergies, et une myriade de PME et de petites sociétés qui reçoivent par la collecte des avis de leurs clients.
Comment vous démarquez-vous par votre accompagnement ?
La demande est basique : entre un produit vendu avec des avis clients et un même produit commercialisé sans leur témoignage, le taux de transformation est beaucoup plus élevé dans le 1er cas. Quand la marque accepte de jouer la transparence, que le client exprime son expérience, le lien de confiance se renforce et les consommateurs achètent ses produits ou services plus volontiers. Le bénéfice immédiat, c’est donc plus de ventes pour la marque et aussi plus de revenus puisqu’elle ne sollicitera pas d’avis si ses produits risquent de récolter une cascade d’opinions négatives. Une entreprise responsable sait qu’elle peut capitaliser sur ses clients et ce lien avec sa communauté fonctionne avec toutes nos autres solutions.
Sur quels points mobilisez-vous vos équipes de R&D pour améliorer vos solutions ?
La R&D représente pratiquement un tiers de nos effectifs. Nous travaillons évidemment sur l’évolution de notre offre existante, par l’apport de nouvelles fonctionnalités et capacités. Mais nous avons aussi une approche innovation plus marquée : nous réfléchissons par exemple à un produit où une marque récompenserait un client qui contribue à son image de marque, au travers, peut-être, de cryptomonnaie ou de points… Notre ambition, c’est un leadership européen, soit par acquisition, soit par développement interne, sur nos compétences métiers d’accompagnement et de conseil de nos clients.
Le réseau CCI de France a lancé avec Google des webinaires de sensibilisation digitale des entreprises et commerçants français. N’y-at-il pas un paradoxe à ce que ces chambres consulaires qui se demandent de promouvoir la “souveraineté” française sollicitent un groupe américain ?
Au-delà de Skeepers, il y a de belles solutions en France et en Europe, un savoir-faire excellent, il ne faut pas le négliger, c’est dommage de suffisamment nos concurrents américains… Nous nous batons pour prouver que nous sommes au même niveau que des solutions poussées par des entreprises incontestablement plus grosses que nous…
Comment envisagez-vous votre internationalisation alors que les cultures de consommation, les pratiques, varient d’un pays à l’autre ?
Nos outils sont conçus et déployés de manière industrielle avec une touche de personnalisation par rapport profils aux clients, aux pays… Je dirais que c’est un atout que nous détenons par rapport à nos concurrents américains. Lorsqu’ils développent un produit, ils s’adressent immédiatement à 300 millions de consommateurs potentiels. En Europe, ils ont plus de mal à cerner ces spécificités régionales.
Nos équipes comprennent la langue, la culture, localisent nos solutions et façons de faire pour approcher le marché car on ne parle pas de la même manière à une entreprise allemande, espagnole ou française. A Madrid, nous nous appuyons sur 50 personnes, à Milan, une dizaine, en Allemagne, une trentaine… Nous pouvons aller très loin dans cette adaptation puisque les contraintes réglementaires changent parfois fortement d’un territoire à l’autre sur les données limitées, leur protection… L’Allemagne s’avère très restrictive sur la préservation des données personnelles.
Sur les trois prochaines années, comment préparez-vous la croissance du groupe ?
Nous souhaitons doubler le chiffre d’affaires et atteindre le cap des 100 millions d’euros, en innovant sur notre cœur de métier de l’engagement consommateur, et ponctuellement par acquisition. Une marque ne peut plus ignorer sa connexion avec ses consommateurs. Mieux vaut donc qu’elle soit proactive sur ces sujets puisque de toute façon, il y aura toujours de la communication non maîtrisée !
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