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Pour Bpifrance, l’écosystème tech français pêche dans l’industrialisation et l’export

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Pour Bpifrance, l'écosystème tech français pêche dans l'industrialisation et l'export

Ce jeudi 16 février 2023, Nicolas Dufourcq, le directeur général de BpiFrance, présentait le bilan de la banque publique d’investissement pour l’année distribuée. “Une très grosse année” bouclée à 1,5 milliard d’euros de bénéfice net (contre 1,8 milliard en 2021). “Avec 67 milliards d’euros injectés dans l’économie française en 2022, nous sommes une institution financière à mission d’intérêt général performante“, at-il poursuivi.

La banque d’investissement a confirmé son rôle important auprès des entreprises, consacrant l’an dernier 17,32 milliards d’euros à leur financement (8,84 milliards en crédits à moyen et long terme, 8,20 milliards en crédits à court termes). Elle affirme détenir 10% de part de marché dans le capital développement des PME et ETI et 6% dans les start-up.

“Une année sélective pour la French Tech”

Pour la French Tech, 2023 va être très sélective. Pour les start-up qui sont juste correctes, qui ont besoin de lever des fonds, ça va être une année difficile. Pour les autres, il va falloir être économes et performantes“, un prévenu le DG.

Rappelons que le bon bilan annuel des levées de fonds dans la French Tech était faussé, de nombreuses levées ayant été bouclées en 2021 s’étant vues décalées sur 2022 pour profiter d’un effet d’annonce. En réalité, les investisseurs ont bien décidé de lever le pied et de se concentrer sur les vraiment louables, cela s’est concrètement senti aux troisième et quatrième trimestres et la tendance devrait durer.

Bpifrance veut industrialiser le secteur tech

Nicolas Dufourcq a profité de ce bilan pour afficher les priorités de l’année à venir et il n’a évidemment pas manqué de parler des efforts réalisés par Bpifrance pour la réindustrialisation de la France, sujet sur lequel l’organisme a été mandaté par le gouvernement, notamment par le biais du Plan France 2030 et en particulier sur le secteur de la deep tech.

Le DG assure vouloir “continuer de pousser les chercheurs à devenir entrepreneurs, puis à industrialiser et commercialiser leurs produits“. Bpifrance remet 500 millions d’euros sur la table sur le “Plan deeptech”, qui se poursuit en 2023, tout comme le “Plan start-up et PME industrielles”, lancé en janvier 2022 dans le but de créer 100 usines par à horizon 2025.

C’est un peu le ‘late stage’ du plan deeptech qui a fait des petits. Il accompagne les start-up de la deeptech qui veulent maintenant devenir industrielles“, explique le DG. 75 d’entre elles seraient actuellement en train de se muer vers des projets d’industrialisation.

Les investisseurs préfèrent le SaaS à l’industrie

Nicolas Dufourcq n’a cependant pas manqué de souligner à quel point le chantier de la réindustrialisation française est colossal et compliqué à mettre en œuvre. “Pour la réussite, il va falloir quinze ans d’efforts continus“, at-il lancé.

La difficulté majeure ? La rareté des investisseurs spécialisés sur ce créneau. “L’industrie est un secteur particulier de l’investissement, il y a un sujet de foncier, le développement [prototypage, tests, certification, ndlr] est long, il faut financer les lignes pilotes et réussir la phase risquée de l’industrialisation“.

En clair, l’industrialisation est trop longue et coûte trop cher, ce qui freine les investisseurs, mais aussi les entrepreneurs à se positionner sur le secteur industriel, lui préférant par exemple le SaaS, plus rapide et moins onéreux à développer.

Face à ce problème, Bpifrance a renforcé le “Plan start-up et PME industrielles” avec le Fonds national de venture industriel (FNVI), qui sera lancé dans quelques semaines, un fonds de fonds doté de 350 millions d’euros, qui vise à faire émerger des fonds de capital-risque ou de capital développement qui soutiendront des projets d’industrialisation portés par des startups et des PME françaises.

Il faut davantage d’investisseurs français spécialisés dans les start-up cotées

L’industrialisation ayant – entre autres – pour objectif la souveraineté, Nicolas Dufourcq insiste également sur le manque d’investisseurs français spécialisés dans la tech cotée, “ceux qui savent patienter, qui ne revendent pas de suite“.

Par le biais du “Club des Investisseurs Cornerstone”, lancé cet été, la banque publique d’investissement”cherche ces investisseurs du private equity et les présente aux plus belles signatures de la tech française, bien en amont si possible, afin de créer le désir“, explique le dirigeant. On pense par exemple à Dataiku, Contentsquare ou Mirakl.

L’écosystème Tech français compte désormais un nombre conséquent de scale-up et de licornes pour demander la sortie privilégiée serait probablement une introduction en bourse. “Ce serait un crève-cœur que ces scale-up entrent sur celles de New York ou d’Amsterdam…“, termine-t-il.

Mauvaises performances de la France sur l’export

Le manque d’attrait pour le “hardware” en amène un autre : les mauvaises performances du pays en termes d’exportation et de commerce extérieur. Oui car il faut des start-up qui fabriquent des produits physiques pour pouvoir exportateur.

À l’international, l’assurance-crédit de Bpifrance a connu une croissance de 59% en 2022, passant de 20,8 à 33 milliards d’euros. “Mais cette activité va retomber autour de 20 milliards en 2023“, un prédit Nicolas Dufourcq, ajoutant : “On ne va pas vendre des Rafales tous les ans…

Sur un accompagnement de 1500 entreprises à l’export en 2022, mais il faudrait que ce chiffre soit multiplié par dix en réalité. Il y a du travail, en France on n’est pas bons sur l’export. En Europe globalement, mais par exemple les Allemands exportent beaucoup en Chine, pas nous», déplore le DG.

Un manque d’investisseurs aussi sur l’internationalisation

Selon lui il faut d’abord revoir les produits, et notamment les simplificateurs. “Il faut aussi oser dire que nos entrepreneurs français doivent se déplacer sur le sujet“, ajoute-t-il. “Notre culture à l’export est insuffisamment développée. Il faut pousser les entrepreneurs dans ce sens et héroïser ceux qui y parviennent, dont on ne parle malheureusement jamais à la télé.”

Par ailleurs il manque, sur la phase d’internationalisation aussi, des investisseurs. Les entrepreneurs doivent avoir davantage de budget pour s’exporter et ils ne peuvent pas vraiment compter sur les banques. “Sur le crédit à l’exportation pour les PME, on a 80% de parts de marché, personne ne le fait“, tient à noter Nicolas Dufourcq.

Un problème à résoudre rapidement car, comme le rappelait Didier Boulogne, directeur général délégué à l’export au sein de Business France, en cette période économiquement difficile “le pari de l’export est gagnant pour nos start-up, rester replié sur soi et ne pas s’attaquer rapidement à l’international serait le mauvais choix“.

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