Le gouvernement veut “accélérer la mise en œuvre» de France 2030, le plan massif d’investissement pluriannuel doté de 54 milliards et dévoilé en grande pompe par Emmanuel Macron en octobre 2021, à en croire la Première ministre. Dans un entretien avec Les Échos Jeudi dernier, Élisabeth Borne a indiqué que 8,5 milliards d’euros avaient déjà été engagés et que ce montant devrait atteindre les 20 milliards d’ici à la fin 2023.
Et la santé numérique n’est pas en reste avec le ministre de la Santé, François Braun, et la ministre de la Recherche, Sylvie Retailleau, ont annoncé lundi depuis Lyon de nouveaux moyens dans le cadre de la stratégie d’accélération de la filière , numéro de France 2030. Cette feuille de route a trois objectifs : encourager la transition d’une médecine curative vers une approche préventive, favoriser l’émergence d’un écosystème de la santé numérique et de traiter les données de santé de manière sécuritaire et éthique. Cette feuille de route”sera le gage d’une entrée durable du numérique dans nos pratiques de santé», a déclaré le ministre de la Santé.
Aussi, ce sont 670 millions d’euros qui ont été initialement mis sur la table pour accompagner les acteurs de la filière et les usagers, de la formation à la recherche, en passant par l’évaluation et l’expérimentation. “Le numérique en santé est un levier majeur pour fluidifier le parcours de soin et améliorer la qualité des traitements», souligne David Sainati, coordinateur interministériel de la stratégie d’accélération au sein de la délégation ministérielle au numérique en santé (DNS), à L’Usine Digitale.
Un an après son lancement, le bilan est très positif : 9 dispositifs (appels à projets ou appels à manifestation d’intérêt) ont ainsi vu le jour, récompensant 61 projets lauréats pour un montant total déjà engagé de près de 150 millions d’euros . “Ça montre à quel point sur un mis le turbo», a expliqué explique David Sainati, qui fait état d’un «engagement de l’écosystème puissant”. Selon lui, ce “succès fou” s’explique par le “tour de France” effectué par le DNS pour présenter ces dispositifs et par la large consultation publique qui a été mené en amont. “La stratégie a réussi à intégrer l’écosystème de la santé numérique” et “s’est concrétisée rapidement“, s’est félicité François Braun.
Accent sur la formation
Fort de ces bons résultats, le gouvernement a même décidé d’allonger le budget accordé à la stratégie par une nouvelle enveloppe de 48,4 millions d’euros. Cet argent devra permettre de compenser les efforts en matière de formation aux usages du numérique en santé pour inciter à leur adoption. “C’est le nerf de la guerre», explique le coordinateur interministériel. “Les bénéfices pour les patients ne seront pas réels si les outils ne sont pas utilisés», ajoute-t-il.
Aussi, cette nouvelle enveloppe devrait permettre de faire l’objectif de 70 000 étudiants en études médicales et paramédicales formés à ces nouvelles pratiques par un à 100 000 étudiants — soit 83 % des étudiants engagés dans cette filière. “Un tiers des futurs professionnels de santé n’était pas ciblés« précédemment, a fait remarquer le ministre de l’Enseignement supérieur, citant notamment les aides soignants, les auxiliaires de puériculture et les aidants professionnels. »Nous ne pouvions pas considérer que certains doivent être formés au numérique et d’autres non“, at-elle ajouté. Le 10 novembre dernier, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et le ministre de la Santé ont par ailleurs rendu cet enseignement obligatoire dès la rentrée 2024.
Ce nouveau budget servira également à la formation des experts du numérique en santé, en continu notamment, et à la formation de “médiateurs numériques” pour accompagner les aidants familiaux.Recruter des ingénieurs et des juristes en santé numérique en France est très compliqué», note David Sainati. “On ne peut pas faire de la France un terrain attractif si on n’a pas le vivier de talents», ajoute-t-il.
Accompagnement l’innovation
La stratégie d’accélération ne concerne pas uniquement la formation, mais souhaite également s’attaquer au sujet de l’évaluation clinique, “condition indispensable à l’accès au marché de ces innovations”. “Une innovation qui a une chance de réussir est une innovation qui a fait ses preuvess”, a souligné François Braun, précisant que, en la matière, il fallait accélérer pour ne pas prendre de retard et ne pas se contenter d’une “vitesse de croisière“. Les ministres ont ainsi dévoilé les 15 projets qui seront accompagnés financièrement dans ces phases d’essai, qui pourront coûter “entre 500 000 et 1 million d’euros», constate David Sainati.
Ce sont 11,3 millions d’euros qui seront déboursés par Bpifrance qui a par ailleurs ouvert son guichet pour l’édition 2023 de cet appel à projets. “On est les seuls à faire ça, c’est très risqué, mais c’est crucial pour développer un secteur pérenne», indique le coordinateur interministériel qui sait à quel point il peut être compliqué de convaincre des investisseurs en amont de ces essais cliniques.
Et puisque le “marché n’a pas de place pour des gadgets”, un autre appel à projets, “Tiers lieux d’expérimentation” va permettre à ses 10 premiers lauréats de tester des dispositifs de santé numérique dans des “structures sanitaires et médicosociales”, comme l’hôpital ou la pharmacie, pour mettre à l ‘épreuve les technologies naissantes face aux besoins réels des acteurs sur le terrain et des usages dans une démarche de co-conception. “Ce n’est que le début“, a ajouté le ministre de la Santé, précisant que 30 “tiers lieux” seront sélectionnés d’ici à 2025 pour un montant d’aide de plus de 63 millions d’euros.
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