“Amener le meilleur du smartphone sur PC”. C’est ainsi que Kedar Kondap, senior vice-président et directeur Compute et Gaming de Qualcomm, a présenté la stratégie du concepteur de semi-conducteurs dans l’informatique. L’entreprise américaine, qui tient cette semaine son sommet annuel à Hawaï, entend profiter notamment de l’essor du travail hybride pour capitaliser sur ses innovations “mobile d’abord”. “Les applications se déportent dans le cloud, et nous voulons tirer avantage de cela”a ajouté Kedar Kondap.
Développeur du marché de Windows ARM
L’un des objectifs de Qualcomm est de développer sa présence dans les PC sous Windows, puisque, comme le dit Alex Katouzian, senior vice-président et directeur de la division Mobile, Compute et XR de Qualcomm, “nous sommes le dénominateur commun à tous les appareils mobiles intelligents et connectés”.
Microsoft est le partenaire exclusif de Qualcomm sur les architectures ARM, qui présente en théorie des avantages pour les PC portables par rapport aux architectures x86 (Intel, AMD) telles qu’une autonomie supérieure de la batterie, la possibilité de se connecter au réseau mobile 4G ou 5G, des designs plus fins et légers, des PC qui chauffent moins, et un allumage instantané.
C’est l’architecture qu’a choisi Apple. Malheureusement pour Microsoft, peu de PC portables sous Windows sur ARM sont aujourd’hui disponibles sur le marché, l’offre ayant eu beaucoup de mal à décoller depuis 2017. On en trouve quelques-uns chez HP, Lenovo et Samsung. Le produit vitrine, chez Microsoft, est la Surface Pro 9 5G, hybride entre tablette et ordinateur portable, reçu le mois dernier. Mais elle souffre des mêmes déficits de performances que ses ainés par rapport au modèle x86, et ce sans que les avantages avancés par Qualcomm sur le papier ne se mesurent en conditions réelles.
En exploitant les capacités de l’IA on-device
Qualcomm veut donc donner un coup de boost à “Windows on Snapdragon” grâce à ses efforts dans l’intégration de l’IA, qui permet de mieux répartir la consommation d’énergie des calculs liés à l’IA sur plusieurs composants : CPU, GPU, et le processeur d’IA Hexagon. Qualcomm affirme que 400 entreprises testent ou déploient actuellement des ordinateurs Windows tournant sur Snapdragon. Parmi elles, la banque Citi, qui va faire migrer 70% de ses 300 000 salariés.
Ses innovations ont été intégrées à Windows 11, notamment dans Windows Studio Effect, pour développer de nouvelles fonctionnalités de visioconférences mises en avant par les deux partenaires lors de la conférence à Hawaï : floutage d’arrière-plan, suppression du bruit de fond, correction des reflets dans les yeux, et cadrage de sujet en mouvement. Les résultats sont obtenus et parleront à de nombreux télétravailleurs. Adobe a par ailleurs annoncé le 16 novembre que plusieurs logiciels de sa suite Adobe Creative Cloud seront disponibles en tant qu’applications natives sous Windows 11 ARM en 2023.
“L’IA sur l’appareil va disrupter tout le secteur : l’OS, les applications, des PC d’un nouveau type…”, croit dur comme fer Peter Burns, directeur du marketing produit chez Qualcomm. Pour Aaron Woodman, directeur du marketing Windows chez Microsoft, c’est fini de mesurer la performance des PC par les seuls CPU et GPU.
Oryon, un nouveau CPU pour disrupter le marché des PC…
Il faut quand même bien parler du vrai sujet, qui est la performance des puces, et à cet égard, Qualcomm avait une annonce importante à faire le 16 novembre. Son nouveau CPU, celui dont le développement a été initié chez Nuvia, entreprise rachetée par Qualcomm en 2021, s’appellera Oryon. Qualcomm, qui a intégré les équipes issues de cette acquisition, a achevé ce qui avait été commencé.
On ne sait en revanche rien de plus sur ce nouveau CPU, notamment s’il est seulement destiné à remplacer les CPU Kryo que Qualcomm développaient jusqu’ici sur la puce Snapdragon 8CX Gen 3 pour PC, ou sur tous ses System-on-a -Ébrécher. Qualcomm cible un déploiement en 2023 pour une mise sur le marché en 2024 à peu près. Signal fort, c’est Gerard Williams, ancien d’Arm, fondateur de Nuvia et architecte de la puce M1 d’Apple, qui est monté sur scène pour présenter Oryon. Avec ce CPU, il promet une “nouvelle ère pour les PC premium sous Windows”.
…A condition de régler la bataille juridique avec Arm
Mais cela ne va pas se passer si facilement. Arm estime que Qualcomm doit obtenir sa permission pour utiliser les designs de Nuvia, soumis à une licence Arm. Ce qu’il n’a pas obtenu, car Qualcomm possède déjà des accords de licence particulièrement étendus avec lui et estime qu’ils suffisent amplement. Les deux sociétés sont dans une impasse et un contentieux en justice a été ouvert fin août. C’est évidemment l’argent qui est en cause. Les droits qui étaient payés par Nuvia (toute jeune société) étaient plus payés que ceux de la licence de Qualcomm, dont les accords remontent aux années 2000.
Armez opportunément choisi la date de l’ouverture de la conférence Snapdragon de Qualcomm, le 15 novembre, pour recevoir de nouvelles pièces au dossier. La société menace Qualcomm de lui interdire purement et simplement l’utilisation des microarchitectures de ses cœurs, qui se retrouvent dans toutes les plateformes Snapdragon. On notera que la prise de position d’Arm n’est pas sans risque. Qualcomm est l’un de ses plus vieux et plus importants clients, et le message envoyé pourrait éroder la confiance que les autres lui accordent. L’architecture libre RISC V n’a jamais douté n’a jamais été aussi attrayante qu’aujourd’hui.
La conférence annuelle de Qualcomm ne s’est pas faite seulement troller par Arm. Cette semaine, le taïwanais Mediatek a annoncé qu’il allait lui aussi attaquer le marché des PC sous Windows ARM, avec une nouvelle version de son processeur pour mobile Kompanio. La société y voit un marché de 40 milliards de dollars.
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