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Comment les télécoms vont s’y prendre pour remorquer les naufragés de la fibre optique

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Comment les télécoms vont s'y prendre pour remorquer les naufragés de la fibre optique
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Les problèmes de raccordement des particuliers à la fibre optique en France sont une réalité, et ils ont beau être concentrés dans certains territoires (Essonne, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne…), ils ternissent l’image de cette technologie auprès du grand public et des collectivités.

Pannes localisées, mauvaise image nationale

Selon Olivier Corolleur, directeur général adjoint de l’Arcep, 8 réseaux de fibre optique représentant 2% du parc au premier trimestre 2022 représentaient la grande majorité des pannes. Altitude Infra et XpFibre, deux opérateurs d’infrastructure exploitant des réseaux d’initiative publique dans les zones peu et moyennement denses, fournissent des chiffres qui corroborent la concentration des pannes dans quelques zones.

Chez Altitude Infra, sur 7200 points de mutualisation (ou “PM”, les fameuses armoires mutualisées dans lesquelles s’effectuent la connexion des fibres de l’abonné et des opérateurs commerciaux), 200 souffriraient d’un problème d’exploitation selon l’ opérateur. Chez XpFibre, 50% des problèmes seraient concentrés sur 2,5% des PM, notamment à Bondy, Saint-Priest, Gagny et Neuilly-sur-Marne.

Derrière ces chiffres un peu abstraits, on découvre une réalité douloureuse pour certaines communes. La députée de l’Essonne Marie Guévenoux indiquait par exemple, lors d’une conférence organisée par le régulateur de télécoms le 22 septembre, que la ville de Soisy-sur-Seine avait enregistré 3200 incidents sur son réseau en 2021 (pour 7000 habitants ! ). Montgeron, Draveil, Saint-Pierre-du-Perray, dans le même département, vivent des situations similaires.

Friture sur les lignes construites avant le plan THD

Mais que se passe-t-il sur les réseaux français, alors que l’Hexagone est le leader de la fibre en Europe ? Les problèmes techniques sont de deux ordres : les réseaux eux-mêmes, et les raccordements effectués par les techniciens.

Concernant les réseaux, ce sont les infrastructures vieilles d’une dizaine d’années qui posent problème. Des réseaux conçus avec une “ingénierie atypique”avant que l’Arcep ne définisse les normes actuelles du plan Très Haut Débit, et dont les PM peuvent raccorder jusqu’à 1000 foyers dans une seule armoire alors que les nouvelles normes limitent ce nombre à 300. Altitude Infra est confronté à ce problème en Essonne, et XpFibre dans la banlieue lyonnaise, par exemple.

Le PDG de XpFibre, Lionel Recorbet, attribue d’ailleurs à cet héritage de 300 PM anciens l’enquête administrative dont il fait l’objet, ouverte par l’Arcep fin 2021 à la suite de nombreux signalements reçus par le régulateur. La présidente de l’Arcep, Laure de la Raudière, attend les plans de remise à neuf de ces PM d’ici le 15 octobre, et jugera en fonction du caractère “suffisamment ambitieux en termes de nombre de communes et d’armoires”.

Les techniciens prix de se plier à de nouvelles procédures

Concernant les raccordements, les pannes de techniciens qui ne respectent pas “les règles de l’art” et débranchent parfois Pierre pour raccorder Jacques. Dans certaines armoires, c’est l’anarchie. “En tant qu’opérateur d’infrastructure, nous avons 6 % d’échecs de raccordement, dont 70 % sont dûs aux techniciens, 30 % au réseau”, explique David El Fassy, ​​le président d’Altitude Infra. Pour Lionel Recorbet de XpFibre, cette situation dérive d’une “crise de croissance” lié au “nombre très conséquent de nouveaux raccordements”qui se chiffrent à 3500 par jour sur son réseau.

C’est pour répondre à ces difficultés que la filière a élaboré un plan qualité en quatre axes : labellisation des intervenants, partage des plannings d’intervention des techniciens pour pouvoir les contrôler, comptes-rendus systématiques d’intervention, et plan de remise à neuf des PM dans un état critique. L’Arcep a déjà reçu les plans de reprise d’Altitude Infra, qui représentent un investissement de 4 millions d’euros pour refaire entièrement 70 PM, et assistent ceux d’Iliad et de XpFibre. Le régulateur s’est engagé à faire un suivi mensuel des engagements des opérateurs, et à le transmettre au ministre délégué au Numérique et aux Télécoms Jean-Noël Barrot.

Un “permis de fibrer”

Sur le sujet de la labellisation, ce dernier a alerté le 5 octobre, s’invitait à l’Université du Très Débit, que l’auto-certification n’était pas une solution acceptable sur le long terme, et que la labellisation par un organisme tiers de confiance devrait prendre le relais plus vite possible. En attendant, pour éviter de mettre à l’arrêt tous les raccordements en voyant tout le monde en formation, la filière va mettre en place une sorte de permis à un point : la certification est accordée d’office, et le technicien la perd s ‘il est pris en flagrant délit de malfaçon.

Quant aux comptes rendus d’intervention, l’objectif est d’améliorer la proportion de photos exploitables, soumis par les techniciens aux opérateurs d’infrastructure. Aujourd’hui, en gros un tiers de ces photos sont valables (les autres sont des floues, des doublons, etc.). Les opérateurs veulent passer à 50 à 70% fin 2022, et 95% en juin 2023, en infligeant des sanctions financières aux opérateurs commerciaux qui missionnent les techniciens. On parle d’un nombre conséquent de photos (1800 par heure chez Altitude Infra), qui seront analysées au moyen de techniques d’intelligence artificielle.

La menace d’une loi plus coercitive

Philippe Le Grand, le président d’Infranum qui représente la filière des infrastructures télécoms, met tout sur ce plan qualité pour redorer le blason de la fibre. “Il faut avoir confiance dans notre plan !”at-il interpellé mardi le sénateur de l’Ain Patrick Chaize, auteur d’une proposition de loi visant à renforcer les contrôles et les sanctions vis-à-vis des opérateurs télécoms, afin de mettre fin aux problèmes de qualité de service sur les réseaux fibre.

“Chichélui répond le sénateur. Mais la confiance n’exclut pas le contrôle.” S’il reconnaît que “les intentions sont là”, Patrick Chaize attend de voir, avant d’accepter éventuellement de retirer son texte. En attendant, il nous affirme que sa proposition de loi est dans le haut de la pile des textes à examiner au Parlement. Il pourrait être avant la fin de l’année.